A quoi servent réellement nos impôts ? Réponse avec Anne Laure Delatte, chercheure en économie
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 Published On Apr 24, 2024

Qui profite véritablement de la manne publique, les ménages ou les entreprises ? Une question iconoclaste à laquelle la chercheuse Anne-Laure Delatte apporte des éléments de réponse inédits dans le premier épisode de ce podcast « On n’a pas tout essayé » produit par Lacmé et proposé par « l’Obs ». L’économiste a ainsi calculé que si le poids des impôts en France a bien augmenté fortement entre 1945 et aujourd’hui, passant de 18 % à 30 % du PIB – et même à près de 50 % si on y inclut les cotisations sociales –, les exonérations fiscales en faveur des entreprises ont dans le même temps explosé. Ces aides publiques sont passées de 85 milliards d’euros par an en moyenne avant 2009 à 190 milliards les années suivantes. Elles atteignent même 270 milliards d’euros en 2021.

Autant d’argent qui ne va pas dans l’éducation, la santé, la justice, la police ou la solidarité. Mais que l’on pourrait décider d’affecter différemment. Des choix cruciaux, surtout à l’heure d’une nécessaire transition écologique. Actuellement, l’Etat distribue en effet annuellement plus de 200 milliards d’euros d’aides aux entreprises qui vont souvent à des secteurs polluants, alors que le budget vert plafonne à 37 milliards. De son côté, la Banque de France investit davantage chez BMW, Volkswagen, Total ou Engie que dans des secteurs verts…

Aux yeux de la chercheuse, la France vit donc dans un régime néolibéral. Mais que signifie véritablement le néolibéralisme ? Ce concept, popularisé par le philosophe Michel Foucault dès la fin des années 1970, se traduit par une intervention plus forte de l’Etat au service des entreprises. L’Etat se transforme en contrôleur du marché, celui qui s’assure qu’il fonctionne.

Ce nouveau rôle dévolu à la puissance publique est devenu visible à partir des années 1980 dans les réformes menées aux Etats-Unis par Ronald Reagan ou celles poursuivies par Margaret Thatcher en Grande-Bretagne. En France, il aura fallu attendre les années 1990. Le Premier ministre Edouard Balladur décide alors d’exonérer les entreprises d’une partie de leurs cotisations sociales. Cette politique sera encore renforcée après la crise de 2008, puis sous François Hollande et encore plus avec Emmanuel Macron.

Car, si un Etat ultralibéral minimise ses interventions publiques pour laisser faire le marché, l’Etat néolibéral, lui, se comporte plutôt comme un régisseur. Il se met au service des marchés financiers et des entreprises, la richesse ainsi créée par les entreprises soutenues par l’Etat étant censée ruisseler vers les citoyens (comme quoi Emmanuel Macron n’a rien inventé…). En parallèle, les services publics et la protection sociale sont délaissés.

Il est donc grand temps, estime Anne-Laure Delatte, que les citoyens prennent pleinement conscience de ces choix qui sont d’abord politiques avant d’être proprement économiques. Nous devrions avoir un seul objectif : accélérer la transition écologique pour faire baisser la température de la planète.

◗ ON N’A PAS TOUT ESSAYÉ est un podcast proposé par « le Nouvel Obs », produit par Lacmé Production.

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